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Direction de projets culturels : le métier « couteau suisse »

UNE DÉFINITION PLURIELLE

L’expression direction de projets culturels et artistiques est composée de plusieurs termes clés, qui peuvent être définis de différentes manières selon leur contexte.

  • La direction, portée sur l’idée d’organisation, d’animation, de responsabilité (1), mais aussi, d’une manière plus conceptuelle, au sens de l’orientation.
  • Le projet, qui s’apparente souvent à l’événement, et à une étape de réflexion.
  • Culturel et artistique, deux termes d’une grande complexité, qui rassemblent un large panel d’œuvres, d’artistes, de pratiques, de cultures, de spécificités, et qui sont parfois difficiles à appréhender et à définir.

Il s’agit, concernant la direction, de l’action de gérer, d’administrer, d’organiser et d’orchestrer (2) quelque chose – pour Vimana, il s’agira de projets. Le directeur de projet dirige et conduit (3) un événement de son début à son terme. Il est chargé du bon déroulement de l’ensemble des étapes d’organisation de ce dernier. En ce sens, la direction est à la fois tournée vers l’organisation, mais aussi vers les choix du directeur de projet. Il oriente son événement en le conceptualisant : vers quel type d’art, pour quels publics, comment trouver et argumenter pour obtenir des financements…

Par ailleurs, le terme de direction fait également référence au management, soit à la direction d’équipes et de personnes. Que ce soit une équipe interne d’organisation, des artistes ou des partenaires, la direction de projet nécessite de savoir s’entourer car si le directeur peut être seul, il mène rarement le projet à son terme sans une équipe solide.

Le projet, quant à lui, est synonyme de ce que nous avons l’intention de faire (4), qui est à ce moment-là une étape de brouillon, de réflexion. Dans ce cas, il représente quelque chose d’envisagé, en construction. Dans son ouvrage, François Mairesse propose la définition suivante :

« Le projet détermine la conceptualisation de l’action, avant son exécution, moment nécessaire pour préparer la réalisation d’une intention. » (5)

François Mairesse, Gestion de projets culturels, 2020.

Ce même auteur (6), expert de la direction de projets notamment dans le secteur culturel, propose d’aborder le projet comme une articulation entre cinq spécificités, qui nous semblent, chez Vimana Paris, des plus justes.

Voici, de manière résumée, ce qu’explique François Mairesse :

En premier lieu, le projet « s’oppose à la routine en ce qu’il est unique et original ». Tout comme « l’événement », le projet représente quelque chose d’exceptionnel, de hors du commun. Il est un moment défini avec un début et une fin, qui ponctuent la vie sociale.

Afin d’organiser et de mettre en œuvre le projet, il faut établir des objectifs à viser et à atteindre. Ceux-ci sont issus d’une « analyse de la situation actuelle de l’organisation » afin de savoir vers où aller. Ces objectifs, qui s’accompagnent généralement d’une vision et parfois d’une problématisation, structurent presque entièrement l’organisation du projet.

Il faut connaître et définir les contraintes liées au projet : de coûts, de délais et de ressources qui permettent de fixer les limites du projet et de faire en sorte qu’il soit viable.

Comme évoqué dans le premier point, une date de début doit être fixée, de même que la date de fin de l’événement, afin de définir au mieux les termes de la réalisation du projet. L’objectif d’une date de fin est également de fixer un « moment d’évaluation » suite à la mise en œuvre du projet : il s’agit du bilan. Ce dernier est primordial, car au-delà d’un archivage, il propose une prise de recul et l’établissement d’un résultat sur le projet.

Les missions du directeur de projet culturel sont donc de coordonner les nombreuses étapes et tâches qui mèneront à l’aboutissement du projet. Il s’agit pour lui de « s’assurer de leur réalisation de manière optimale, dans les meilleurs temps ».

Pour finir, les projets dont nous parlons depuis le début de cet article sont culturels et artistiques.

« Le projet culturel pourrait donc être défini comme un projet dont la finalité est la production d’un bien ou d’un service lié à la culture » (7)

François Mairesse, Gestion de projets culturels, 2020.

Que rassemblent ces deux termes ?

Vimana Paris travaille sur des projets en lien avec toutes les cultures et toutes les formes d’arts, reconnues ou non, institutionnalisées ou non. D’innombrables cultures et arts sont présents dans l’ensemble de nos groupes sociaux.

Quelles sont les clés pour appréhender l’ensemble de ces sujets ?

Savoir où sont nos expertises et où sont nos lacunes sont des clés indispensables pour pouvoir travailler sur un sujet qui ne nous est pas familier. Pour pouvoir concevoir un projet avec du sens, il est nécessaire de comprendre, connaître, savoir appréhender, et maîtriser les thématiques de ce dernier.

Si la direction de projets culturels et artistiques est mise à part du reste de l’événementiel, c’est parce qu’elle est composée d’un grand nombre de spécificités : législation autour de la culture, notamment sur la propriété intellectuelle, économie des secteurs, médiation culturelle, étude sociologique des publics pour les cibler, ou encore moyens de financements. Il est alors nécessaire d’allier la pratique à la théorie dans ce milieu, base que nos formations nous ont amplement apportée.

De cet ensemble de définitions et de commentaires, Vimana Paris vous propose sa définition de la direction de projets culturels et artistiques. Il s’agit de l’organisation complète et de la coordination technique et logistique de projets à caractère culturel et/ou artistique, quels que soient leur forme, leur sujet ou leur durée. Intrinsèquement à la conception de ces projets se trouve la médiation culturelle – autre pôle d’action de Vimana Paris.

UN MÉTIER À PART ENTIÈRE

Puisque la direction de projets culturels et artistiques est un secteur spécifique, et comme tout métier, sa pratique nécessite des compétences particulières et des savoir-faire. Il faut avant tout être polyvalent, et avoir des connaissances de base dans de nombreux domaines différents.

Il est notamment possible de parler de :

Compétences en matière de droit de la culture et de la propriété intellectuelle.

Pour pouvoir gérer des projets et événements dans le secteur culturel, il est nécessaire d’avoir une connaissance du Code de la propriété intellectuelle et de la législation du secteur, sur les assurances spécifiques aux événements culturels par exemple. L’idée n’est pas d’être juriste, mais la connaissance des règles de base est obligatoire. Il faut savoir comment rémunérer les artistes, comment fonctionnent leurs droits sur leurs œuvres ou encore comment rédiger un contrat.

Compétence en matière de compréhension de l’économie des secteurs culturels.

En économie, les secteurs culturels sont tous plus spécifiques les uns que les autres. Prix unique du livre, gouffre économique des concerts (c.f. la loi de Baumol appliquée au secteur musical), mais aussi régimes salariaux spécifiques, comme l’intermittence, le paiement au cachet et la gratuité des débutants… Autant de raisons pour lesquelles différents fonctionnements concernant la culture existent entre pays : le secteur étasunien ne fonctionne pas avec des subventions, mais compte sur les mécènes et les dons de particuliers, tandis que l’État français subventionne davantage.

Compétences en ciblage et étude des publics.

Pour pouvoir créer un projet culturel, il est nécessaire de réfléchir aux publics qui viendront ; ils constituent le cœur de l’événement. Comprendre leurs attentes est important et nécessite à nouveau le mélange de la théorie sociologique, des arts, de l’anthropologie à la pratique du ciblage des publics. La direction de projets culturels et artistiques ne se concentre pas majoritairement sur les recettes économiques, bien qu’elles soient importantes et prises en compte, mais plutôt sur la manière d’utiliser les arts et la culture pour développer, fidéliser et diversifier les publics. La notion de public est étroitement liée à celle de médiation culturelle, qui vient ponctuer un projet culturel.

Compétence en conceptualisation de projet.

À nouveau, ce point est étroitement lié à notre vision de la médiation culturelle, pensée de manière intrinsèque à la direction de projet. Selon Vimana, il faut pouvoir non seulement diriger et organiser le projet, mais également l’imaginer, que ce soit de toutes pièces ou avec les idées du client. Imaginer une exposition, avec une soirée culturelle de danse et de musique, une pièce de théâtre mélangeant dramaturgie, arts visuels et chant, mise en scène dans un espace non dédié à la culture, le tout accompagné de dispositifs de médiation pertinents demande de réelles compétences et une connaissance du secteur et des possibilités. La conceptualisation d’un projet est une étape à part entière, qui nécessite du temps et de l’investissement.

Ici, nous ne citons que certaines spécificités propres, pour Vimana, à la direction de projet. Cependant, il faut ajouter à cela le reste des compétences et des savoir-faire de l’organisation d’un projet ou d’un événement : gestion des prestataires, des fournisseurs, des partenaires, des invités, etc.

L’EXPERTISE EN INGÉNIERIE CULTURELLE

Depuis quelques années, l’expression ingénierie culturelle se fait entendre, mais que veut-elle dire ? Comment allier l’ingénierie, vue comme un domaine technique, et la culture, souvent opposée à ce premier terme ?

Qu’est-ce que l’ingénierie ?

« Ensemble des fonctions allant de la conception et des études à la responsabilité de la construction et au contrôle des équipements d’une installation technique ou industrielle.» (8).

Souvent associée aux domaines techniques ou scientifiques, l’ingénierie culturelle, est de plus en plus considérée et entendue.

SI les spécificités de la direction de projet culturel sont nombreuses, elles commencent à être reconnues comme telles. Du fait de savoir conceptualiser, organiser, mettre en œuvre un projet culturel, de la conception à la réalisation, leurs directeurs en deviennent des ingénieurs capables de gérer l’ensemble de ces « fonctions ».

En 1986, Claude Mollard, expert en ingénierie culturelle, conseiller spécial du président de l’Institut du monde arabe, artiste-photographe et écrivain, propose une définition de cette expression. Trente ans plus tard, dans la collection Que sais-je ?, il la définit à nouveau :

« L’ingénierie culturelle est la capacité d’apporter des solutions optimales, en termes de qualité, de coûts et de délais, aux demandes exprimées par les partenaires de la vie culturelle pour la définition d’objectifs, la mise en œuvre de programmes, la mobilisation de financements et la réalisation artistique et technique de projets culturels. […] Elle suppose le respect, à parts égales, des règles rationnelles du management et du sens de la création artistique. » (9)

Claude Mollard, Steven Hearn, L’ingénierie culturelle, 2016

C’est en effet la preuve de la reconnaissance des compétences spécifiques à ces métiers, qui peuvent bien souvent être associées à des fonctions littéraires, artistiques et éloignées des nécessités d’organisation, de structuration et de rationalité qui incombent à l’ingénierie classique. Les métiers liés à la direction de projets culturels sont en effet organisationnels et rationnels. Il s’agit pour les organisateurs d’événements et les directeurs, de mener à bien un projet, souvent constitué d’œuvres d’artistes qui n’ont pas pour habitude de se charger de ces tâches. Il apparaît donc indispensable de proposer des compétences complémentaires à la créativité et à la productivité des artistes pour leur permettre d’exposer leur travail sous toutes les formes de projets culturels.

Si l’ingénierie culturelle regroupe un ensemble de compétences qui offrent au directeur de projet la capacité à apporter des solutions en raison d’une connaissance spécifique du secteur, combinée à une expérience riche et variée, dont peut témoigner l’équipe de Vimana.

Quelles différences avec la direction de projets culturels et artistiques ?

Voici deux définitions de l’organisation de projet, que nous pouvons comparer avec celle de l’ingénierie culturelle.

« [L’organisation est] un processus unique, qui consiste en un ensemble d’activités coordonnées et maîtrisées comportant des dates de début et de fin, entrepris dans le but d’atteindre un objectif conforme à des exigences spécifiques » (10)

Gilles Garel, Le management de projet, 2011.

« La mise en œuvre de connaissances, d’outils et de méthodes dans des activités projets afin de satisfaire, voire de dépasser les besoins et les attentes des parties prenantes du projet. » (11)

Défintion du projet culturel par le Projet Management Institute, traduite par François Mairesse, dans Gestion de projets culturels, 2020.

En comparaison avec la définition de l’ingénierie culturelle citée précédemment, ces définitions ne sont pas si lointaines, à la différence près que l’ingénierie culturelle met l’accent directement sur les spécificités culturelles, qui ne sont pas présentes dans la simple définition de l’organisation. De plus, l’ingénierie aura tendance à se porter plus largement sur les solutions et les objectifs, tandis que la définition de François Mairesse (11) accentue le trait sur la satisfaction des besoins.

Par ailleurs l’organisation de projet met en avant l’aspect unique d’un événement : chaque projet se compose d’objectifs, de délais, de coûts et de demandes propres à lui-même. Bien que certains de ces points se rejoignent entre certains d’entre-eux, l’originalité dans la conceptualisation d’un projet ne semble pas être présente dans cette rapide définition de l’ingénierie culturelle. Cependant, chez Vimana Paris, cette créativité est tout aussi centrale que les règles du management.

Pourquoi Vimana n’utilise pas l’expression d’ingénierie culturelle ?

À la différence de la direction de projets culturels et artistiques, l’ingénierie culturelle ne prend aucunement en compte les notions de publics et de médiation culturelle, qui sont pour nous au cœur de la conception d’un projet.

Vimana Paris est à l’écoute des publics, et se place au service des artistes, des clients, et des institutions. Les échanges avec les équipes qui font partie, ou gravitent autour d’un projet, sont primordiales pour le bon déroulement d’une organisation de projet.

BIBLIOGRAPHIE

ARNAUD Lionel, Agir par la culture, ed. Édition de l’Attribut, coll. La culture en questions, 2018

CHAUMIER Serge, MAIRESSE François, La médiation culturelle, ed. Armand Colin, coll. U, 2017

EVRARD Yves, Le management des entreprises artistiques et culturelles, ed. Economica, 2004.

GAREL Gilles, Le management de projet, ed. La Découverte, coll. Repères, 2011.

MAIRESSE François, Gestion de projets culturels, ed. Armand Colin, 2020

MAIRESSE François, ROCHELANDET Fabrice, Économie des arts et de la culture, ed. Armand Colin, coll. U, 2015.

NÉRÉ Jean-Jacques, Le management de projet, ed. PUF, coll, Que sais-je ?, 2015.

MOLLARD Claude, HEARN Steven, L’ingénierie culturelle, ed. PUF, coll. Que sais-je ?, 2016.

MOLLARD Claude, L’ingénierie culturelle, ed. PUF, coll. Que sais-je ?, 2020.

FORMATIONS

Quelques formations après le baccalauréat

Quelques Masters (Après un Bac+3)

Master mention Direction de projets ou établissements culturels.

à Montpellier : Master 2 mention direction de projets ou établissements culturels – UFR 1 Lettres, art, philosophie, psychanalyse à Montpellier.

à Bordeaux : Master mention Ingéniérie de projets culturels et interculturels – UFR lettres – lettres langues, Université Bordeaux Montaigne.

à Lyon : Master 1 Direction de projets et d’établissements culturels, Université Lumière Lyon 2.

à Grenoble : Master Direction de projets culturels, administration et action publique, avec l’option “Métiers de la culture” ou l’option “Cadres culturels territoriaux” à Sciences Po Grenoble.

(1) Définition I.B. du terme “direction” du TLFI

(2) Définition du terme “direction” du Larousse.

(3) Définition du terme “direction”, Le Robert en ligne.

(4) Défintion du terme “projet” du CNRTL

(5) François Mairesse, Gestion de projets culturels, 2020.

(6) François Mairesse, Gestion de projets culturels, 2020, et ce pour toutes les ciations présentes dans le résumé.

(7) François Mairesse, Gestion de projets culturels, 2020.

(8) Définition du terme “ingénierie” du TLFI

(9) Claude Mollard, Steven Hearn, L’ingénierie culturelle, 2016

(10) Gilles Garel, Le management de projet, 2011.

(11) Défintion du projet culturel par le Projet Management Institute, traduite par François Mairesse, dans Gestion de projets culturels, 2020.